République du Congo. Rendons à l’ENAM, le lustre de son éclat extérieur initial

TRIBUNE. A Brazzaville, cité des esprits éclairés, cité des hommes et des femmes de culture, cité des arts, cité du monde du football, la concession de l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM), est étonnement parsemée de huttes, masures et autres cabanes de sommaire construction, en vieilles tôles ondulées, où sont pratiqués des commerces informels, particulièrement la restauration et les débits de boisson. Cet ensemble de baraques, bien visibles, en longeant l’avenue des AET, crée un paysage hideux, dans l’espace qui abrite l’immeuble historique de l’ENAM.

Comme si cela ne suffisait pas, les étudiants qui occupent les chambres du campus de l’ENAM y ajoutent une note sombre en étalant des vêtements, serviettes, draps et autres pagnes, sur les balustres des balcons des étages du bâtiment du campus.

Tout ce dispositif insalubre et glauque destiné au secteur informel altère l’allure extérieure de l’ENAM. Et les autres établissements universitaires de Brazzaville ne sont pas loin de présenter la même physionomie, vus du dehors.

Passez devant la Faculté des Lettres et Sciences Humaines, legs culturel et architectural du Centre d’Enseignement Supérieur de Brazzaville (CESB) dont les murs de la devanture étaient, a l’époque, repeints à chaque rentrée universitaire, la cour balayée, chaque jour, par des agents d’entretien, votre regard est attiré par ces commerces informels qui se partagent la cour avec les étudiants, aux heures de pause.

On peut comprendre que tenir en état de propreté une vaste agglomération, de la dimension de Brazzaville, de près d’un million d’habitants, n’est pas une opération aisée, en ce qu’elle exige une logistique, à la fois, de grande envergure et techniquement appropriée. Par contre, est intolérable que l’ENAM, lieu de formation universitaire, bien circonscrit, dans un périmètre, proche d’un Palais des Congrès, centre de conférence internationale où des étrangers prennent part à des réunions, ne soit pas, avec distinction, l’objet d’une discipline d’entretien satisfaisante.

Bien plus, que les autorités académiques de ce lieu ne puissent pas être à mesure de résister à sa laide occupation par des étals, tréteaux et autres paillottes de commerçants dont on ne sait s’ils sont enregistrés dans les services du commerce ou déclarent leurs revenus auprès des rouages spécialisés du Ministère des Finances, la chose est insupportable.

Les impératifs d’urbanisme et d’entretien aussi bien, au sein des établissements universitaires que dans les structures des cycles d’enseignement du premier et second degré, devraient être des défis majeurs pour la municipalité. La présence des étals de commerce informel sur les places publiques dégrade l’image de la ville, engendrent dans bien de cas, des problèmes de sécurité et de propreté, source de maladies.

Le chômage et la nécessité de survie poussent les Congolais à se tourner vers le commerce informel aux fins de gagner leur vie. Mais le manque d’encadrement pédagogique, peut être aussi de réglementation sur les activités commerciales informelles contribuent à la prolifération de celles-ci. Pour un rien, la présence de paillottes et autres étalages pour du commerce informel obscurcit l’image de la ville, crée une impression de désordre et d’un déficit de contrôle de l’activité commerciale. Est à ce propos, désolant, le spectacle des petits commerces à l’entrée principale du Centre Hospitalier Universitaire de Brazzaville.

Peut être faudrait il que les pouvoirs publics congolais étudient des règles et des indications d’encadrement pour les activités commerciales informelles, afin de les rendre mieux organisées et pas gênantes pour les espaces publics.

Ce faisant, créer dans certaines superficies urbaines, des zones commerciales dédiées spécialement aux vendeurs du secteur informel, afin de les intégrer dans l’économie formelle et de réduire la pression sur les lieux publics. Sensibiliser les habitants et les commerçants à l’importance de maintenir le charme, l’esthétique et l’ordre dans les espaces publics qui sont des endroits ouverts de citoyenneté, de laïcité, de partage, et non des sites d’appropriation pour des intérêts particuliers. Sans compter que maintenir l’image de propreté dans la ville, est important pour attirer les touristes et les visiteurs, pourquoi pas, les investisseurs.

Dans le cas des lieux de formation, la splendeur crée un cadre agréable d’apprentissage pour l’esprit de l’apprenant quelqu’en soit son niveau et son âge.

Les commerces informels dans les concessions universitaires ont un impact négatif sur l’image et les valeurs que ces institutions représentent pour la nation. Ils portent atteinte aux symboles de beauté et de distinction qui sont associés aux établissements d’enseignement supérieur. D’autant que ceux ci sont conçus pour être des espaces agréables à voir, hygiéniques, accueillants, propices à la réflexion, à l’apprentissage, à la connaissance. Les commerces informels défigurent leur apparence, nuisent à leur agrément et à leur réputation. Ici, un code est possible sur ce genre de commerce en vue de garantir le respect des valeurs de beauté et le prestige des établissements.

De par le monde, les structures bâties de cafés et restaurants universitaires cohabitent avec les salles de cours et les amphithéâtres, dans les mêmes sites affectés aux universités. Ceux des universitaires congolais, formés à l’étranger, s’y sont servis. Si l’Université Marien Ngouabi devrait s’aligner sur la logique que j’estime utile des restaurants et cafés universitaires, le Ministère de l’Enseignement Supérieur n’a qu’une solution. Procéder à un appel d’offre libre et objectif, concluant sur des résultats justes et transparents, sans parti pris, avec cahier de charges rigoureux.

Les structures des restaurants et cafés universitaires installées dans les espaces universitaires, disparaîtront d’eux mêmes, ces points de vente informels qui entachent l’environnement des universités. Restera, alors, à conditionner l’état d’esprit des étudiants logés au campus de l’ENAM pour qu’ils s’adaptent à la nouvelle donne. Il reviendrait conséquemment à la Direction de l’ENAM de se créer les moyens d’accompagner les étudiants dans le nouveau genre de vie qui leur sera demandé de suivre.

Au Lycée Victor Augagneur Karl Marx de Pointe-Noire, d’octobre 1972 à juin 1976, l’établissement n’était nullement côtoyé par une espèce de ces commerces informels aux abords des batiments peints en blanc du lycée, encore moins à l’intérieur de la cour. Et pourtant, dans la ville de Pointe-Noire, comme ailleurs au Congo, le chômage et le besoin de survie étaient bien pressants.

Redonnons à l’ENAM le lustre de son éclat extérieur initial.

Brazzaville 4 octobre 2025

Ouabari Mariotti

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